Manifestations du 27 février 62: rejet de la politique coloniale visant à diviser le territoire national

Manifestations du 27 février 62: rejet de la politique coloniale visant à diviser le territoire national

OUARGLA – Les manifestations du 27 février 1962 constituent une preuve formelle du rejet catégorique de la politique de la France coloniale visant à diviser lu territoire national, en tentant de séparer le Sud du reste du pays, ont affirmé des universitaires, historiens et moudjahidine à l’occasion de la commémoration du 61ème anniversaire de ces soulèvements populaires.

Date phare dans l’histoire de l’Algérie, ces manifestations, encore gravées dans la mémoire collective des Ouarglis et dans le Sud du pays en général, traduisent le rejet explicite de la population locale, aux côtés de leurs concitoyens des autres régions du pays, des desseins et manœuvres de la France coloniale ayant pour objectif de séparer cette région du reste du pays, et expriment la volonté du peuple de préserver l’intégrité territoriale de l’Algérie, selon des historiens spécialisés dans le mouvement révolutionnaire national dans le Sud du pays.

Lakhdar Aouarib, de l’université Kasdi Merbah d’Ouargla, a qualifié cet évènement de « dernier clou planté dans le cercueil de la France coloniale » qui a, a-t-il affirmé, « opté pour une politique de division territoriale du pays, vouée à l’échec, politique de division longuement et sournoisement concoctée qui consistait en la mise en œuvre, depuis 1947, de lois et mesures répressives et arbitraires à l’encontre de la population locale en vue de mettre la main sur la région, spolier ses richesses et ériger, faisant fi de la vie de la population locale et avoisinante, une base d’expérimentation des odieuses explosions nucléaires dévastatrices ».

« Les autorités coloniales qui n’ont ménagé aucun effort pour mobiliser leurs moyens humains et matériels de l’intérieur et de l’extérieur pour atteindre leur objectif, se sont heurtées à la bravoure et à la résistance du peuple algérien qui avait fait front uni pour défendre et préserver son unité territoriale », a expliqué M. Aouarib, avant de signaler que « la France coloniale, voulant à tout prix préserver sa main mise sur le Sud du pays, s’est lancée en 1957 dans son projet malveillant de division suite à la création de deux départements, la Saoura, région de Béchar, et les Oasis à Ouargla, en sus de la nomination d’un ministre chargé des affaires du Sahara, appuyé par un budget de gestion ».

Et d’ajouter: « Imprégné des idées et valeurs de liberté, de militantisme et de rejet catégorique de l’occupation française, la population locale, engagée dans la guerre de libération nationale du 1er novembre 1954, n’a pas tardé à déjouer les visées du président Charles De Gaulle qui tentait de saper l’unité territoriale nationale et dont les soulèvements du 27 février 1962 à Ouargla en ont été l’expression explicite du refus catégorique de diviser l’Algérie et de porter atteinte à son intégrité territoriale ».

Selon l’académicien, la programmation des manifestations, bien que la région ait été fortement assiégée par le colonisateur, a été minutieusement planifiée et traduisait la sage organisation et coordination du commandement du Front de libération nationale (FLN) et de ses représentants dans la région. Le choix de la date n’était pas fortuit, mais bien fixé par les responsables de la Révolution qui ont adressé, une journée avant, le 26 février 1962, des instructions strictes émises et signées par le lieutenant Channoufi Mohamed, officier de l’Armée de libération nationale (ALN) aux notables, Chouyoukh et aux quatorze responsables de l’organisation de la Révolution dans la région les appelant à sortir dans la rue le jour « J » dans des manifestations massives.

Répondant à cet appel, les citoyens se sont regroupés au lieu fixé, connu communément par

« Souk El-Hedjar », au centre ville d’Ouargla, pour une marche de refus de la politique coloniale, scandant des slogans hostiles à la colonisation, entonnant des chants patriotiques et brandissant des banderoles aux slogans condamnant le joug colonial et appelant à la préservation de l’unité nationale, dont « Le Sahara Algérien », « Non à la séparation de la patrie » et « Pour l’unité nationale ».

En riposte à ces manifestations massives, les forces coloniales n’ont pas hésité à user de leurs armes à l’encontre de citoyens sans défense, tuant, sur place, cinq personnes, dont le Chahid Chatti Louakal, et faisant plus de 25 blessés, a relaté l’universitaire.

           

Fort appui aux représentants algériens aux négociations d’Evian

 

Pour l’enseignant d’histoire moderne et contemporaine à l’université d’Ouargla, Ahmed Dokar, les manifestations populaires du 27 février 1962 ont « fortement appuyé les négociateurs aux accords d’Evian et ont été une étape déterminante avant le cessez-le-feu, le 19 mars 1962, pour la libération du pays du joug colonial ». Cet évènement a démontré à l’opinion publique française et internationale, a fait savoir l’universitaire, que « le Sud est une partie intégrante de la géographie algérienne et qu’il a mis en échec les visées coloniales et hâté le recouvrement de la souveraineté nationale ».

L’universitaire a estimé également que ces soulèvements ont brisé la force coloniale et encouragé les populations d’autres régions dans le Sud du pays d’emboiter le pas à leurs pairs et de sortir dans des marches populaires similaires, à l’instar de celles de Touggourt, le 7 mars 1962, et de la région de Nouggar, le 13 du même mois.

Ces manifestations, a-t-il ajouté, ont eu un grand écho médiatique, car relayées par des organes de presse, journaux et Radio « la Voix de l’Algérie libre », animée, depuis la Tunisie, par le journaliste révolutionnaire Aïssa Messaoudi.

Evoquant ces soulèvements, le Moudjahid Belkhir Righi, un des artisans de ces manifestations, a rappelé que ces dernières ont « contribué à mettre à nue la propagande coloniale, notamment sur la scène internationale, alléguant que le Sahara était français, chose rejetée catégoriquement par les citoyens de la région qui ont déjoué les visées de la France coloniale désirant s’emparer des richesses nationales dans le Sud du pays, notamment à la suite de la découverte du pétrole ».

Le Moudjahid Abdelkader Touahir, un des participants aux manifestations, a souligné que ces évènements constituent une « réponse claire aux mensonges colportés par l’administration coloniale prétendant que les citoyens dans le Sud du pays étaient attachés à l’Etat français ».

Par souci de préserver la mémoire nationale, l’association « Manifestations du 27 févier 1962 » d’Ouargla s’emploie à archiver les témoignages des Moudjahidine de la région, auteurs de ces évènements, des participants, des familles de Chouhada et des historiens des différentes universités du pays pour enrichir les recherches historiques sur la lutte des populations dans le Sud contre le joug colonial.

Elle œuvre, dans ce sillage, à mettre la lumière sur les résistances populaires et évènements historiques ayant jalonné l’histoire du pays dans le Sud algérien.

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