La Déclaration du 1er novembre : Un modèle pour les générations futures

La Déclaration du 1er novembre : Un modèle pour les générations futures - Algérie

Lorsque le premier groupe de moudjahidine de la Révolution de libération algérienne a déclenché, le 1er novembre 1954, leur révolution bénie, la première balle tirée dans les montagnes des Aurès n’était pas seulement un signe du déclenchement d’une révolte armée contre l’oppression et l’esclavage, mais constituait également, en parallèle, une proclamation de la naissance d’un projet d’État, dont les contours étaient dessinés par la Déclaration du 1er novembre, adressée par les initiateurs de la révolution, les moudjahidine du Front de libération nationale, à l’ensemble du peuple algérien.

La rédaction de la Déclaration du 1er novembre a été réalisée avec la participation de tous, notamment du groupe historique des six, et non d’une seule personne. Elle a été tapée par Mohamed Laïchaoui pour finaliser le texte de la déclaration de la révolution, après l’élaboration de ses grandes lignes lors de la réunion du 10 octobre 1954, qui s’est tenue à El-Madania, dans les hauteurs d’Alger.

Parmi les principes et les objectifs de cette déclaration éternelle, qui constitue une référence intellectuelle et politique pour le projet de l’État algérien moderne, figurent :

Réaliser l’indépendance nationale par :

  1. La création d’un État algérien démocratique et social, souverain dans le cadre des principes islamiques.
  2. Le respect de toutes les libertés fondamentales sans distinction raciale ou religieuse.

La déclaration souligne également que l’un de ses principaux objectifs externes est « d’atteindre l’unité de l’Afrique du Nord dans son cadre naturel arabe et islamique », et les moudjahidine ont choisi comme mot d’ordre le déclenchement de la révolution algérienne (Obstacles — Khaled), qui incarne toutes les significations d’appartenance à l’islam et à l’arabité.

La « novembre » était réellement un projet d’État tel que le concevaient les moudjahidine, un rêve des martyrs, ayant puisé tous les éléments d’authenticité du peuple qui sont restés debout malgré les tentatives du colonialisme de les effacer pendant plus d’un siècle et trente ans de colonisation. Cette dernière était différente des autres formes de colonialisme, car elle visait à dépouiller la personnalité algérienne de ses composantes et de ses dimensions, avant de s’attaquer à la terre.

Appel au peuple algérien

Voici le texte du premier appel adressé par le secrétariat général du Front de libération nationale au peuple algérien le 1er novembre 1954 :

« Ô peuple algérien,

Ô militants de la cause nationale,

Vous êtes ceux qui émettront votre jugement à notre égard — c’est-à-dire du peuple en général et des militants en particulier — nous vous informons que l’objectif de la publication de cette déclaration est de vous expliquer les raisons profondes qui nous ont poussés à agir, de vous clarifier notre projet et l’objectif de notre action, ainsi que les composantes de notre point de vue fondamental qui nous ont conduits à l’indépendance nationale dans le cadre nord-africain, et également notre désir de vous éviter toute confusion que pourrait provoquer l’impérialisme, ses agents administratifs et certains politiciens opportunistes.

Nous considérons avant tout que le mouvement national — après des étapes de lutte — a atteint la phase de réalisation finale. Si l’objectif de tout mouvement révolutionnaire est, en réalité, de créer toutes les conditions révolutionnaires pour entreprendre un processus de libération, nous considérons que le peuple algérien, dans ses conditions internes, est uni autour de la cause de l’indépendance et de l’action, tandis que sur le plan externe, la détente internationale est propice à la résolution de certains problèmes secondaires, parmi lesquels notre cause qui bénéficie d’un soutien diplomatique, notamment de nos frères arabes et musulmans.

Les événements au Maroc et en Tunisie sont significatifs à cet égard, car ils représentent en profondeur les étapes de la lutte de libération en Afrique du Nord. Il est à noter qu’en ce domaine, nous avons longtemps été les premiers à appeler à l’unité dans l’action. Cette unité, malheureusement, n’a jamais pu se concrétiser entre les trois pays.

Chacun d’eux s’est aujourd’hui engagé dans cette voie, mais nous, qui sommes restés à l’arrière, faisons face à un sort dépassé par les événements. Ainsi, notre mouvement national s’est retrouvé brisé, après de longues années d’immobilisme et de routine, mal dirigé, privé du soutien de l’opinion publique nécessaire, ayant été dépassé par les événements, ce qui a conduit le colonialisme à se réjouir, pensant avoir remporté d’énormes victoires dans sa lutte contre l’avant-garde algérienne.

La situation est grave.

Face à cette condition qui pourrait devenir impossible à traiter, un groupe de jeunes militants responsables, réunissant la plupart des éléments encore sains et déterminés, a jugé que le moment était venu de sortir le mouvement national de l’impasse dans laquelle il a été plongé par les luttes personnelles et les influences, pour le pousser vers la véritable bataille révolutionnaire aux côtés de nos frères marocains et tunisiens.

À cet égard, nous clarifions que nous sommes indépendants des deux parties qui se disputent le pouvoir, car notre mouvement a mis l’intérêt national au-dessus de toutes considérations futiles et trompeuses concernant des personnes et des réputations, et il est donc uniquement dirigé contre le colonialisme, qui est le seul ennemi aveugle, ayant refusé, face aux moyens de lutte pacifique, d’accorder la moindre liberté.

Nous pensons que cela constitue des raisons suffisantes pour que notre mouvement de renouveau apparaisse sous le nom : Front de libération nationale.

Ainsi, nous tirons toutes les concessions possibles et offrons à tous les citoyens algériens, de toutes les classes sociales et de tous les partis et mouvements algériens, la possibilité de se joindre à la lutte de libération sans aucune autre considération.

Pour préciser notre objectif, nous énonçons ci-dessous les grandes lignes de notre programme politique.

Objectif : l’indépendance nationale par :

  1. La création d’un État algérien démocratique et social, souverain dans le cadre des principes islamiques.
  2. Le respect de toutes les libertés fondamentales sans distinction raciale ou religieuse.

Objectifs internes :

  1. Purger politiquement le mouvement national en le ramenant à son véritable chemin et en éliminant toutes les séquelles de la corruption et l’esprit de réforme qui ont été des facteurs importants dans notre actuelle régression.
  2. Rassembler et organiser toutes les forces saines au sein du peuple algérien pour éliminer le système colonial.

Objectifs externes :

  1. Internationaliser la question algérienne.
  2. Réaliser l’unité de l’Afrique du Nord dans son cadre naturel arabe et islamique.
  3. Dans le cadre de la Charte des Nations Unies, nous affirmons notre solidarité active envers tous les peuples qui soutiennent notre cause de libération.

Moyens de lutte :

En harmonie avec les principes révolutionnaires, et tenant compte des situations internes et externes, nous continuerons le combat par tous les moyens jusqu’à l’atteinte de notre objectif.

Le Front de libération nationale, pour atteindre son but, doit accomplir deux tâches essentielles simultanément : travailler sur le plan interne, tant sur le plan politique qu’au niveau du travail pur, et agir à l’étranger pour faire de la question algérienne une réalité sur la scène mondiale, en s’appuyant sur tous nos alliés naturels.

Cette tâche est lourde et exige toutes les forces et la mobilisation de toutes les ressources nationales. En vérité, la lutte sera longue, mais la victoire est assurée.

Enfin, pour éviter les interprétations erronées et pour souligner notre réelle volonté de paix, spécifiquement pour limiter les pertes humaines et les effusions de sang, nous avons préparé pour les autorités françaises un document honorable pour discussion, si ces autorités ont de bonnes intentions et reconnaissent définitivement aux peuples qu’elles colonisent leur droit à l’autodétermination.

  1. Reconnaissance de la nationalité algérienne de manière publique et officielle, annulant ainsi toutes les allégations, décisions et lois qui considèrent l’Algérie comme une terre française, malgré l’histoire, la géographie, la langue, la religion et les coutumes du peuple algérien.
  2. Ouverture de négociations avec les représentants mandatés par le peuple algérien sur la base de la reconnaissance de la souveraineté algérienne, indivisible.
  3. Création d’un climat de confiance par la libération de tous les détenus politiques et l’arrêt de toute poursuite contre les forces combattantes.

En contrepartie :

  1. Les intérêts français, qu’ils soient culturels ou économiques, acquis de manière loyale, seront respectés, tout comme les personnes et les familles.
  2. Tous les Français souhaitant rester en Algérie auront le choix entre leur nationalité d’origine et seront alors considérés comme étrangers au regard des lois en vigueur ou choisiront la nationalité algérienne, et dans ce cas, ils seront considérés comme Algériens avec tous les droits et devoirs qui en découlent.
  3. Les liens entre la France et l’Algérie seront déterminés et feront l’objet d’un accord entre les deux puissances sur la base de l’égalité et du respect mutuel.

Ô Algérien, nous t’invitons à approuver ce document, et il est de ton devoir de te joindre à nous pour sauver notre pays et œuvrer à ce qu’il retrouve sa liberté. Le Front de libération nationale est ton front, et sa victoire est ta victoire.

Quant à nous, déterminés à poursuivre le combat, confiants dans tes sentiments anti-impérialistes, nous offrons à la patrie tout ce que nous avons. »

1er novembre 1954

Le secrétariat national.

A lire également

Lire également