Football-Evocation: La lente agonie de l’USMO, doyen des clubs musulmans d’Oran

Football-Evocation: La lente agonie de l'USMO, doyen des clubs musulmans d'Oran

ORAN – A M’dina Jdida et dans tout l’ancien  »down town » d’Oran, les mordus de la balle ronde pleurent l’état végétatif dans lequel se trouvent actuellement des équipes de football fétiches, vitrines vivantes d’un passé sportif et militant prestigieux, des icônes du football oranais nées durant la dure nuit coloniale. Si on parle ici et là du MCO (mai 1946), et l’ASM Oran (1933), peu ou prou évoquent l’Union Sportive Musulmane d’Oran, ou le SC Médiouni.

Le doyen des clubs musulmans d’Oran, la mythique USMO, est né le 1er mars 1926, cinq années seulement après la naissance du MC Alger, dans la foulée d’un extraordinaire mouvement nationaliste de création de clubs musulmans où les Algériens peuvent pratiquer leur sport favori, le football, sans passer par les clubs européens.

Avec la naissance de l’Association des Oulémas Algériens et les premiers partis nationalistes, le football deviendra très vite fin des années 1920 et au début des années 1930 et comme pour narguer les festivités du Centenaire de l’invasion de l’Algérie, un moyen efficace d’affirmation de l’identité nationale et de mobilisation de la jeunesse algérienne.

Après le Mouloudia d’Alger, vient donc début mars 1926 et à quelques encablures de la triste célébration du Centenaire, l’Union sportive musulmane d’Oran, par abréviation USMO, née à Mdina J’dida, au cœur de la vielle ville. Les mêmes statuts que ceux du MCA ont été déposés par les membres fondateurs de la jeune association sportive, c’est à dire la création d’une association sportive musulmane qui n’obéit pas à la loi française de 1901 sur les associations, comme le sont d’ailleurs les clubs et associations sportives et culturelles des  »pieds noirs ».

Très proche de l’Association des Oulémas Algériens, l’USMO, avec son passé glorieux dans la lutte sur les terrains de football contre le colonialisme et la mobilisation politique et culturelle des jeunes Oranais, s’est illustrée également sur les terrains de football: le club avait remporté 7 fois le championnat d’Oran entre 1932 et 1950, ainsi que la Coupe d’Oran de la saison 1951-1952.

Le palmarès du club compte également le titre de vice-champion nord-africain à trois reprises (1933,1935 et 1950).

L’aventure avait commencé au début du 20e siècle, une période coïncidant avec la fondation de plusieurs clubs et associations européennes par des pieds noirs. C’est alors que des associations sportives musulmanes ont commencé à apparaitre en Algérie à l’instar du MC Alger au centre, du CSC à l’est (1926, selon la FAF). Et comme ces derniers, les Oranais devaient s’unir eux aussi pour créer à leur tour une association qui représenterait la communauté sportive des Algériens d’Oran.

           

–La lente agonie du doyen des clubs musulmans d’Oran–

 

Pour autant, l’USM Oran, à l’instar de tous les clubs et associations sportives musulmanes de cette époque, avait du mal à se faire reconnaitre officiellement à cause des entraves administratives imposées par les autorités administratives coloniales. Ainsi, il a fallu attendre 1926 pour voir le club obtenir son acte de naissance.

Il fallait également, une exigence de la Ligue oranaise de football association (LOFA), intégrer dans l’équipe trois européens, sinon aucune autorisation de création de l’association ne sera délivrée.      

Le mérite dans le long combat engagé dans le processus de la création de l’USMO revient notamment aux nationalistes Sadek Boumaza, Bendouba dit El Fellous, Benkoula, Boumefraa, et autres Nemri, Gharmati, les fondateurs de la première association sportive musulmane oranaise qui deviendra peu de temps après sa création un club omnisports avec plusieurs disciplines, telles que l’Athlétisme, le Basket-ball, la Boxe, le Cyclisme, et bien sûr la section Football, qui sera un mythe à Oran, en Algérie et dans toute l’Afrique du Nord.

Contrainte par l’administration coloniale française de changer de nom, l’USMO a mené un autre combat pour conserver son appellation, un combat qui durera des années et un bras de fer historique se fera entre la direction du club et le gouverneur général d’Oran qui finira par céder en clôturant le dossier  »USMO » par la Circulaire  »5599 CM » du 8 septembre 1936. Le club était ainsi le premier à intégrer dans son sigle son caractère « musulman » en Algérie et dans toute l’Afrique du Nord.

La période postindépendance fut le début de la descente aux enfers de l’USMO qui, après avoir raté l’accession parmi l’élite, n’a pas pu se remettre sur les bons rails malgré plusieurs tentatives de sauvetage par des anciens dirigeants, entraineurs et joueurs du club.

Et, malgré un énième essai d’un retour au-devant de la scène du football national dans les années 1970 avec la venue de plusieurs grands joueurs tels Bachir Sebaâ ou Hamid Tasfaout, ces derniers et autres vont malheureusement rejoindre les deux grands clubs voisins en l’occurrence le MCO et l’ASMO. L’histoire se répètera dans les années 1980 et 1990, mais conduira au même résultat.

Aujourd’hui, l’USMO, qui a accouché, après une scission en son sein menée par Cheikh Tayeb El Mhadji et son cousin Miloud El Mehadji en 1933 de l’ASMO, boucle ses 97 ans d’existence. Plus que trois ans donc et ce club fêtera son centenaire, mais dans la douleur. Pis, au fil des années, il s’expose à la disparition tellement il poursuit, d’année en année, une vertigineuse chute libre.

Un triste sort pour le doyen des clubs musulmans de la région Ouest du pays, qui se meurt dans un silence total, ne suscitant ni inquiétude ni souci de la part des sportifs et des responsables concernés.

Abandonnée par ses dirigeants tout au long des précédentes saisons, l’USMO ne pouvait éviter deux relégations de suite lors des quatre précédentes saisons, pour se retrouver en Régionale 1 où il occupe la 7e place avec 19 points pour 14 matchs joués.

Le doyen des clubs musulmans de l’ouest du pays mange aujourd’hui son  »pain noir », et les différentes tentatives de le sortir du purgatoire n’ont pas, hélas, réussie. La proximité des deux géants de la ville, le MCO et l’ASMO, en serait-elle la raison? 

 

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