« Algérie, mon amour », un film « provocateur » aux relents de la « France nostalgique »

« Algérie, mon amour », un film « provocateur » aux relents de la « France nostalgique » - Algérie

ALGER – Le documentaire intitulé « Algérie, mon amour », diffusé mardi soir sur une chaîne française, revêt un caractère « provocateur » et des relents de la « France nostalgique », ont estimé mercredi des universitaires et des experts qui mettent en garde contre « les dessous » non avoués de cette production.

« Force est de reconnaître que les Français nostalgiques ne font jamais les choses à moitié. Ils sont parfaits comme le néant et le vide. Hier, ils avaient excellé dans la déformation et le travestissement de nos réalités, pourtant claires et limpides comme l’eau de roche », a réagi, dans une déclaration à l’APS, Chabane  Zerrouk, cadre supérieur de l’Etat à la retraite.

Qualifiant le film réalisé par Mustapha Kessous et dédié au Hirak de « navet » et de « ratage parfaitement réussi », il a estimé que celui-ci « procède de la mentalité bien ancrée dans l’inconscient des résidus de la France coloniale et d’un passé à jamais révolu ».

Faisant rappeler le film documentaire « l’Algérie vue du ciel », diffusé en 2015, l’intervenant a relevé la « coïncidence » de celui-ci suivi mardi soir par de nombreux Algériens avec un autre débat sur l’Algérie, programmé au même moment sur l’autre chaîne française LCP.


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Ce qui l’amènera à ajouter : « ces pêcheurs en eau trouble cherchent à biaiser et à déformer l’image dérangeante de l’Algérie, terre d’Islam, de l’intelligence, de la noblesse, de la bravoure et  de l’héroïsme », avant de déplorer un documentaire « minable, maudit et de basse extraction qui jette du discrédit sur son réalisateur et ses sponsors et les disqualifient devant l’histoire ».

A propos des clichés que le film a tenté de mettre en avant, M. Zerrouk dira : « les gothiques, les partisans de l’Algérie de papa, de l’Algérie des marginaux et des gays, de l’Algérie des veuves, doivent savoir qu’ils n’auront jamais de place dans l’Algérie du preux peuple algérien. Ils ne font que glisser sur la pente savonneuse de notre indifférence la plus totale ».

Et de poursuivre : « Qu’ils sachent que le train-Algérie avance à grande vitesse, celui qui le rate ne pourra prétendre au statut piteux d’un déclassé de l’histoire », avant de conclure en évoquant la célèbre déclamation du Général Giap : « l’impérialisme est un mauvais élève ».

 

« Un cadeau empoisonné »

 

Pour le chercheur Ahmed Mizab, il s’agit d’un « cadeau empoisonné » concocté par « une France qui n’a jamais voulu du bien à l’Algérie et dont les conséquences se feront ressentir au moyen terme ». Ceci, explique-t-il, « dans le sens où le Hirak risquera de perdre son caractère pacifiste car des manifestants seront remontés contre d’autres et poussés à la confrontation ».

Tout en considérant que « le timing de la diffusion vise à créer un troisième souffle au mouvement qui ne soit pas pacifique », le chercheur appréhende que le documentaire n’ait pour effet de « provoquer des sensibilités idéologiques et de susciter de forts discours discriminatoires ».

A ses yeux, le film « a mis à nu une face cachée qui a choqué plus d’un, à leur tête ceux qui revendiquent le projet d’un Etat civil, rendant ainsi justice à l’Armée nationale populaire (ANP), qui n’a eu de cesse de mettre en garde contre les risques d’infiltration du Hirak et contre les manœuvres visant à porter atteinte à l’Algérie, à travers certains slogans qui y sont brandis ».

Aussi, l’analyste plaide-t-il pour « la vigilance face aux dessous » de cette production, avant de souligner que le Hirak « qui avait, le 22 février 2019, suscité l’adhésion populaire pour le changement, n’est pas le Hirak que d’aucuns ont transformé en tribune pour faire valoir leurs projets destructeurs ».

Docteur en Sociologie politique, Fatma Kebour tient à préciser, citant le sociologue Pierre  Bourdieu, que « toute production télévisuelle est une construction d’une réalité sociale et politique vue par son émetteur, et ne représente qu’une vision parmi d’autres de la vraie réalité ».

 

Le Hirak, un signe de « bonne santé »

 

De son point de vue, le souci aujourd’hui « n’est pas l’investissement de la rue par le peuple algérien, bien au contraire, le Hirak a permis à ce dernier de retrouver son unité et une réconciliation réelle avec lui-même ! « .

Et d’estimer que « ce mouvement populaire ne doit pas être considéré comme étant une crise sociale ou politique mais plutôt comme un ‘continuum’ de la participation politique  de l’individu, un signe de bonne santé et un sursaut populaire ».

A travers le Hirak, les Algériens ont « réinvesti la chose politique », poursuit-elle, notant que ce mouvement est représenté par une diversité sociale, politique et idéologique (intellectuels, démocrates, islamistes) mais aussi par les marginaux « qui font partie de notre société et partageant  les mêmes combat et objectif pour une  nouvelle Algérie avec une jeunesse se projetant dans un avenir meilleur !». Un aspect sciemment occulté par le réalisateur du très controversé documentaire, regrette-t-on.

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